Histoire de la technique vocale
Publié le mercredi 13 janvier 2021
Au fil des siècles, diverses techniques ont été développées pour donner du volume et du caractère à la voix des chanteurs et des chanteuses. La technique qui vous convient le mieux dépend du son que vous préférez. Dans ce premier épisode de la série sur la technique vocale, nous vous emmenons dans l’histoire fascinante du chant.
Crédit photo : Jelmer de Haas
- Volume
- Belcanto
- Son ouvert
- Au-dessus de la chorale de gospel
- Tin Pan Alley et comédie musicale
- À travers le micro
- Chant brutal
- Choix artistique
- Bon à savoir
- Parler et chanter
- Membres du groupe, épargnez votre chanteur !
- Cours de chant oui ou non ?
- Choisir le professeur de chant qui vous correspond
- Voir également
Volume
Depuis combien de temps le chant existe-t-il ? Et comment chantait-on autrefois ? Nous ne le savons pas vraiment. Les premiers enregistrements audio ont été réalisés à la fin du XIXe siècle, après que Thomas Edison ait inventé en 1878 le phonographe, c’est-à-dire le précurseur du gramophone. Pourtant, il existe des traditions en matière de chant qui ont été transmises de génération en génération et qui donnent donc une bonne image de la manière dont le chant s’inscrivait dans cette tradition. Songez aux chœurs grégoriens et aux chants des moines tibétains. Ce que nous savons également, c’est comment la technique du chant s’est développée en Europe au cours des trois et quatre derniers siècles. Et nous avons aussi une bonne idée de ce qui s’est passé en Amérique au cours des cent dernières années. Cette histoire de la technique du chant est principalement caractérisée par la recherche du volume. Chanter fort, pour ainsi dire. Au milieu du siècle dernier, il y a eu un bouleversement lorsque nous avons pu amplifier le chant à l’aide entre autres du micro. Cette avancée a ouvert la voie à de nouvelles possibilités pour le chant. Lisez la suite pour découvrir l’histoire du chant.
Belcanto
Une tradition importante de la musique classique est le « belcanto » qui signifie « beau chant » en italien. Cette technique de chant est née à la Renaissance, c’est-à-dire la période qui suit le Moyen Âge et qui s’est achevée vers 1500. Après la période sombre du Moyen-Âge, l’art et la littérature ont connu une époque florissante en Europe. Les nobles pouvaient se permettre d’aller à l’opéra, ce qui a contribué à l’essor de ces disciplines. Les œuvres sont ainsi devenues de plus en plus grandioses, avec des orchestres et des chœurs de plus grande ampleur qui se produisaient dans des théâtres encore plus monumentaux. Les performances des chanteurs qui chantaient en solo étaient donc de plus en plus exigeantes. Ils devaient interpréter ces œuvres lyriques en fournissant de plus en plus de volume, mais il fallait absolument que le rendu final reste beau à entendre. C’est ainsi qu’est né le belcanto il y a trois ou quatre siècles. Il s’agit donc d’une technique permettant de chanter bien et fort à la fois. Le développement du belcanto est la première manifestation dans l’histoire qui consistait à donner plus de volume à la voix.
https://www.youtube.com/watch?v=r3PVupoXy-Q
Son ouvert
Le principe de base du belcanto est de faire en sorte que l’espace entre le larynx et le palais mou soit le plus grand possible, ce qui donne un son ouvert et puissant à la voix. Pour ce faire, il est essentiel de disposer d’un bon soutien de la respiration. Sans ce soutien, le larynx remonte dans les notes aiguës. Un exercice courant dans le belcanto est de chanter des gammes (avec le piano), qui vont de plus en plus haut. L’objectif est que la voix dans les aigus reste aussi ouverte que dans les graves. L’inconvénient est que les textes chantés sont difficiles à comprendre, car en gardant le larynx bas, tous les sons se ressemblent. À l’époque, le belcanto n’avait guère de fondement scientifique, car la connaissance de l’anatomie humaine était encore assez limitée. La technique du belcanto était purement basée sur l’observation et la mise en pratique. Le belcanto a été enseigné dans la plus pure tradition aux nouvelles générations, et ce jusqu’à ce jour (300 ans après sa création !). En musique classique (mais aussi dans de nombreux cours enseignés dans les conservatoires), la technique du belcanto est toujours enseignée. En effet, cette technique est à la base de la musique classique traditionnelle.
Au-dessus de la chorale de gospel
Nous allons à présent faire un saut chronologique de plusieurs siècles (et aussi par-dessus l’océan) pour nous retrouver dans l’Amérique du XIXe et du XXe siècle. En débarquant en Amérique, les esclaves noirs avaient apporté avec eux le blues et le gospel. Le blues pouvait être chanté très modérément, mais pour le gospel, c’était très différent. En effet, le gospel est destiné à être interprété dans des églises bondées, avec des musiciens et une chorale. Les chanteurs devaient donc avoir du coffre pour se faire entendre au-dessus de tout ça. Les solistes d’une chorale de gospel sont généralement les membres de la chorale qui se sont automatiquement élevés au-dessus des autres en chantant différemment. Ils chantent avec un son puissant et ouvert. Pas à la manière du belcanto, mais avec un son qui évoque davantage un appel et qui ressemble parfois même à des cris. Ils n’avaient certainement pas appris cette technique au conservatoire, mais c’était leur manière de chanter naturellement. C’est ainsi que le chef d’orchestre les a choisis pour devenir soliste. De nos jours, il existe encore des chanteuses qui ont ce genre de voix comme Tina Turner, Aretha Franklin et Anastacia. L’acuité du son, surtout dans les aigus, rend cette technique plus facile à comprendre que le belcanto. Et c’est bien sûr important avec la musique religieuse comme le gospel.
Tin Pan Alley et comédie musicale
Nous restons en Amérique et nous abordons désormais le début du XXe siècle. C’est l’époque de la célèbre Tin Pan Alley, le surnom de la 28e rue ouest (entre la 5e et la 6e Avenue) à New York. Cet endroit grouillait de magasins où l’on pouvait acheter entre autres des partitions de musique. Presque chaque magasin avait un piano sur lequel le propriétaire pouvait composer quelque chose pour vous sur place si, par exemple, vous vouliez surprendre votre mère le jour de son anniversaire avec une chanson spéciale. Vous pouviez ensuite emporter les partitions chez vous et vous entraîner. La Tin Pan Alley a été importante pour la musique américaine. Dans les années les plus florissantes de la Tin Pan Alley, la comédie musicale a également fait son apparition. Tout comme avec le gospel, il y avait aussi un orchestre que le soliste devait surpasser pour être entendu et compris par la foule. De même que pour le gospel, cela nécessitait une nouvelle technique pour chanter fort que l’on avait baptisé le belting. En anglais, « to belt out » signifie « crier ». C’est pourquoi le belting est une technique qui ressemble à des cris et des hurlements, tout comme dans le gospel. Dans les aigus, il s’approche même des hurlements. Le terme « belting » suscite encore beaucoup de confusion, car tout le monde ne le comprend pas de la même manière. Mais ce qui reste intéressant, c’est qu’une technique similaire apparaît simultanément dans la comédie musicale et dans le gospel.
À travers le micro
Si le belcanto a été la première manifestation visant à donner le plus de volume possible à la voix, la comédie musicale et le gospel sont à la base de la seconde. Avec ces techniques, le plafond est pour ainsi dire atteint, il n’est pas possible de chanter plus fort. Du moins pas sans amplification. Après la Seconde Guerre mondiale, la technique consistant à amplifier des instruments et du chant a été développée et la réalisation d’enregistrements a vu le jour pour la diffusion à la radio. Ces avancées ouvrent des perspectives pour chanter d’une manière différente. L’interprétation peut se faire de manière plus subtile, grâce au micro et à l’amplification. Les groupes d’accompagnement (à l’époque, des groupes de jazz) n’étaient pas si grands non plus. C’est pourquoi, dans les années 50, on a vu apparaître les crooners qui pouvaient fredonner des chansons avec un charme fou et à un volume plus faible. Des exemples bien connus sont Nat King Cole et Frank Sinatra. Après deux phases dans lesquelles on recherche à chanter le plus fort possible, il y a maintenant une phase dans laquelle on peut se permettre de chanter plus doucement.
Chant brutal
Mais un peu plus tard, malgré l’amplification électrique, on assiste à un retour de la tendance précédente avec une troisième vague. En y regardant de plus près, il ne s’agit pas vraiment de chanter fort, mais de chanter d’une manière qui semble forte. Il s’agit de chanter plus brutalement. Cela paraît fort, mais ce n’est pas le cas. La base de cette technique de chant est de chanter avec votre voix parlée. Pour ce faire, la compression est utilisée : les cordes vocales se resserrent légèrement et sont poussées les unes contre les autres. Le larynx n’est plus maintenu aussi bas que possible, mais peut simplement suivre sa tendance naturelle à remonter dans les aigus. Bien que cette technique se fasse au détriment du volume, elle permet d’obtenir un son clair. Et vous obtenez une tessiture jusqu’aux notes les plus hautes de la voix sans avoir l’air fluette. En plus de cela, un chanteur peut choisir d’ajouter une distorsion. Il s’agit (souvent consciemment) d’une distorsion du son en rabattant l’épiglotte vers l’arrière. Cette distorsion enlève un peu d’énergie, et donc de volume, mais elle paraît très rauque. Elvis Presley, Buddy Holly et Jerry Lee Lewis sont des exemples célèbres du nouveau son du rock’n roll. Ces chanteurs lancent une nouvelle tradition, que nous connaissons encore aujourd’hui. D’ailleurs, la musique R&B (et environ 80 % de la musique pop actuelle) est impensable sans chanter avec compression à volume moyen.
Choix artistique
À l’heure actuelle, la technologie a atteint un tel stade avancé qu’il n’est pas nécessaire d’être forcé de choisir une technique vocale particulière. Vous choisissez le son qui vous convient et qui correspond au style de musique que vous voulez chanter. Le choix d’une technique de chant particulière au XXIe siècle est donc un choix artistique qui vous appartient. Avez-vous besoin de cours de chant pour cela ? Pas toujours, mais c’est souvent bénéfique. Lisez le paragraphe ci-dessous « Cours de chant oui ou non ? » pour savoir si des cours vous pourraient vous convenir.
Dans le prochain épisode de cette série, nous aborderons les bases de la voix et traiterons du sujet de la respiration.
Bon à savoir
Parler et chanter
En principe, toute personne qui peut parler peut aussi chanter. Et si vous ne pouvez pas chanter juste par nature, vous pouvez généralement l’apprendre. Il n’en reste pas moins qu’une voix est plus facile à développer que l’autre. Néanmoins, vous pouvez toujours améliorer votre voix en vous écoutant beaucoup (faites des enregistrements) et en réfléchissant à la façon dont vous aimeriez vous exprimer. Techniquement parlant, le chant est très similaire. La parole et le chant ont tous les deux une mélodie. Mais en chantant, la gamme mélodique est généralement plus large et la tonalité est plus précise qu’en parlant. En outre, le chant est plus exigeant pour la voix. Par exemple, les notes sont maintenues plus longtemps en chantant qu’en parlant. Cela nécessite une utilisation plus consciente de votre soutien de la respiration que lorsque vous parlez. Ce soutien est employé naturellement, mais quelqu’un qui parle n’est pas toujours conscient de la façon dont il le fait. Le soutien de la respiration empêche l’air de s’échapper trop rapidement, afin d’atteindre la fin de la phrase. Vous trouverez plus d’informations à ce sujet dans le prochain épisode de la série. La plupart des problèmes vocaux des chanteurs surviennent parce qu’ils veulent chanter trop fort avec leur voix parlée (avec compression) ou encore parce qu’ils veulent chanter très doucement et qu’ils ne peuvent pas lâcher la compression.
Membres du groupe, épargnez votre chanteur !
La voix a une limite physique, quelle que soit la force avec laquelle vous l’amplifiez. Tous les membres du groupe doivent en être conscients, surtout pendant les répétitions. Souvent, lors des répétitions, le groupe joue trop fort, ce qui fait que le chanteur ou la chanteuse ne s’entend plus bien et se met à chanter plus fort (et même trop fort !). La voix souffre beaucoup à cause de cela. Pour vous donner une idée, c’est un peu comme conduire sur l’autoroute en restant en deuxième vitesse. Vous risquez alors une panne de moteur. Les chanteurs souffrent généralement plus lors des répétitions que lors des concerts. Les répétitions se déroulent souvent dans de petits espaces, où le son ne peut pas se disperser, mais où les musiciens veulent quand même avoir la même sensation que sur scène. De plus, de nombreux amplis guitare ont un défaut : ils ne sonnent bien que lorsqu’ils sont au maximum. Et le batteur ne peut souvent pas se permettre d’avoir une batterie spécialement pour les répétitions qui produira moins de volume. Ce problème peut être partiellement résolu en plaçant le batteur derrière un paravent en plexiglas. Mais jouer à un volume élevé pendant les répétitions est au détriment de votre (vos) chanteur(s) et des chansons. Si vous êtes un chanteur et que vous travaillez avec un groupe qui répète beaucoup trop fort, alors vous pouvez vous demander si ce groupe vous convient ou vous pouvez avoir une conversation avec les membres de votre groupe. Si votre groupe persiste à ne pas écouter, vous pourrez peut-être résoudre ce problème sur le plan technique en utilisant des écouteurs intra-auriculaires pendant les répétitions. Mais ne chantez pas plus fort que vous ne pouvez le supporter. C’est dangereux pour votre voix. Et vous ne produirez probablement pas le son que vous pensez être le mieux adapté à la chanson.
Cours de chant oui ou non ?
Vous pouvez faire appel à un professeur de chant si :
- vous voulez savoir si vous avez du potentiel inexploité en tant que chanteur ou chanteuse
- vous voulez de l’aide pour choisir parmi les nombreuses possibilités de votre voix
- vous voulez prendre conscience de votre voix et de ses capacités et faiblesses
- vous souhaitez vous améliorer ou étendre vos possibilités
- vous voulez augmenter votre tessiture
- vous avez des problèmes de voix après des répétitions ou des concerts
- vous désirez faire des enregistrements en studio et vous avez besoin d’un coaching personnel
Choisir le professeur de chant qui vous correspond
« Si vous recherchez un professeur de chant, choisissez quelqu’un qui peut vous enseigner ce que vous voulez apprendre », explique Alfons Verreijt, professeur de chant. « Votre professeur de chant ne doit pas interférer avec vos goûts ou vos préférences pour un son ou un style de musique. Un bon professeur de chant vous apprend à mieux faire « votre truc ». En général, le belcanto n’est donc pas la technique qui vous aide dans la musique pop. Le belcanto est une technique de chant avec laquelle on essaie d’atteindre un idéal sonore classique. Elle ne constitue donc pas une base pour chanter de la pop. Il est préférable de chercher un professeur qui peut enseigner la méthode Estill Voice Training System (EVTS) ou la technique Complete Vocal Technique (CVT), par exemple. Ensuite, vous apprendrez également à chanter avec la compression (voir l’article). Et à crier et hurler sans abîmer votre voix. »
Voir également
» Le soutien de la respiration et le cycle respiratoire en chantant
» Correction de la justesse : Auto-Tune, Melodyne… est-ce de la triche ?
» Comment enregistrer un chœur
» Mixage d’enregistrements de chant en 5 étapes
» Enregistrer et amplifier sa voix
» Tous les articles sur la technique vocale
» Tous les articles sur le chant
» Micros et accessoires
» Livres de chant
» Effets vocaux
» Enceintes